Elles ont la saveur, le croquant et la fraîcheur des légumes; elles en possèdent les qualités nutritionnelles. Leurs teneur en oligo-éléments, en vitamines A et C peut dépasser de 300 à 500 fois celles des graines sèches : les graines germées ne sont pas que des éléments de décoration, mais le cœur d’une véritable alimentation vivante. A Charleroi sur le zoning de la rue de la Station de la Sambre, Joseph Meli a fait de leur production et de leur transformation une activité prospère depuis le milieu des années 90. Les premières expérimentations remontent à 1984 : avec son ex épouse, le précurseur qui a découvert les jets de luzerne se lance dans une culture artisanale. Il lui faut attendre quelques années pour convaincre les premiers gros clients de l’intérêt d’un produit diététique et sain. Aujourd’hui, la graine germée Meli Jo est référencée dans toutes les enseignes de distribution (40% du chiffre), chez les meilleurs grossistes ; on la trouve aussi sur les tables des plus grands restaurants…
Alimentation vivante
Joseph Meli a imposé un produit qui n’existait pas. Il a adapté la technique de germination du soja à d’autres variétés de graines : radis, poireau, pois, betterave rouge, pourpier, fenouil, roquette… C’est une symphonie de goûts et de couleurs qui n’a jamais fini d’évoluer. L’entreprise qui consacre un budget important à la recherche apparaît comme une référence européenne. C’est à Couillet d’abord, puis à Gosselies que son fondateur développe à petite échelle l’activité de production et d’emballage avant d’implanter l’usine en 1994 sur un site industriel de 1800 mètres carrés, où l’affaire prend de l’expansion. Le cycle de fabrication y est parfaitement maîtrisé, de la prégermination à la récolte. Joseph Meli conçoit un procédé innovant salué au salon des inventeurs de Bruxelles par une médaille de bronze. Les opérations d’emballage et d’étiquetage s’exécutent en zone froide. Meli Jo propose une gamme d’une vingtaine de graines germées et quelques salades en mélange. La société dispose de toutes les agréations et certifications pour l’agroalimentaire.
Une croissance continue
Les ventes affichent une croissance continue de 15% par an. Le personnel va suivre la même évolution pour atteindre à la fin 2006 un effectif de seize unités. Meli Jo impose sa production en Belgique mais également en France, et jusqu’aux Antilles. L’entreprise exporte encore aux Pays-Bas, en Italie, en Suisse. Son assortiment de base se trouve dans toutes les enseignes belges (Delhaize, Champion, Cora, Match), les épiceries bio, chez les grossistes. La PME fournit aussi les cuisiniers les plus prestigieux, comme Alain Ducasse et Pierre Gagnaire, dans des commandes parfois spéciales. On apprécie enfin les saveurs de ses produits dans les buffets d’événements mondialement réputés comme le Grand Prix de Francorchamps ou le tournoi de Roland Garros.
La tendance de consommation est à une alimentation saine, équilibrée, naturelle. On redécouvre les vertus des choses simples : Meli Jo réfléchit à la mise aux point d’un programme d’alimentation vivante. Caviar de graines germées ou pains à base du même produit. C’est Philippe Pluquet, ancien manager de Bio Marché à Sombreffe récemment entré comme associé dans la PME, qui travaille à ce projet.
Joseph Meli
Joseph Meli s’est toujours senti proche des plantes. C’est ainsi qu’il expérimente chez lui, dans sa salle de bain qui lui sert de laboratoire, la germination des graines avant d’en faire une activité accessoire qui complète des petits boulots. Il est comédien et artiste peintre, mais pour vivre, travaille comme mécanicien dans une concession Renault avant d’animer des soirées en discothèque. Plus tard, il va décorer des façades de commerces. Quand Joseph Meli lettre les devantures de restaurants, il en profite pour leur faire découvrir la saveur de ses graines germées : « neuf fois sur dix, le produit les séduit et ils le commandent. » C’est ce qui va le convaincre de lancer son projet d’entreprise. D’abord seul puis avec sa femme, ensuite avec l’aide d’un livreur. Au départ, son affaire n’est pas prise au sérieux. Surtout, elle n’est pas bien comprise. Sa production est tellement innovante qu’on ne sait pas dans quel secteur la classer : la scrl Meli Jo entrera finalement à la fois en agriculture pour la production -où ses 2000 mètres carrés en font la plus petite exploitation du pays- et en agro alimentaire pour la partie transformation et emballage.
Expériences d’entrepreneurs en 4 questions et réponses
Quelle idée nouvelle est à la base de la création de votre entreprise ?
Transposer une technique millénaire utilisée pour le soja –la germination- à une série de légumes pour en retrouver la fraîcheur, le croquant, le goût, avec toutes leurs propriétés diététiques et nutritionnelles. Avec nos graines vivantes, nous avons véritablement ouvert une nouvelle voie en Europe.
Quelle est la plus grande difficulté que vous ayez rencontrée pour créer ou développer votre entreprise ?
Nous nous sommes heurtés au manque d’ouverture d’une fonctionnaire de la Région wallonne qui a mis la survie de notre entreprise en danger. C’était un manque de volonté de sa part de comprendre notre activité, si bien que nous n’avions droit à aucune reconnaissance de notre caractère innovant, inclassable. Cet obstacle ne nous a heureusement pas envoyé dans le décor.
Quelle est la plus grande joie ou satisfaction que vous a procuré votre entreprise et –si c’est le cas- pourquoi n’auriez vous pas pu vivre la même chose en tant qu’employé ?
Il y a le caractère très créatif de l’activité. Chaque année, notre gamme s’enrichit. Mais il y a surtout le sentiment de faire quelque chose d’utile pour les générations futures. Nous avons la satisfaction d’avoir lancé un beau projet. C’est ici à Charleroi que la graine germée a vu le jour. Meli Jo est une référence internationale.
Quel petit « truc » proposeriez-vous à un jeune entrepreneur ?
Je lui dirais d’écouter son instinct d’entrepreneur. Quand on est riche d’un beau projet, il faut le mettre en œuvre, le concrétiser. Aller au bout de ses rêves, c’est fantastique. Je conseille aussi aux jeunes de ne pas trop compter sur les aides qui leur sont présentées : si elles viennent, tant mieux ! Mais les intégrer dans un calcul de coût d’investissement est dangereux, j’en ai fait l’expérience.



















